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LieTesRatures JeNaisse
31 décembre 2007

A la vie, à la ...

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A la vie, à la ...
Marie-Sabine Roger
François Roca
Nathan 1998

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A la vie, à la... Le mot, jamais prononcé, n'est pas esquivé. La mort annoncée est celle d'un enfant, le narrateur, probablement atteint d'un cancer. La vie se défait et la langue, comme le corps, entre en naufrage : mots caresses, mots colères, mots délires, tous enchevêtrés les uns dans les autres pour dire en même temps l'appel et la résistance, l'espoir et l'abandon. Les médecins sont des techniciens négligents de la vie intérieure tant qu'elle n'est pas saisissable par des cachets, des piqûres, des examens... La mère, aimante, est digne et le voisin, monsieur Lescale, va escorter l'enfant jusqu'aux portes de ce dernier voyage, dans cette Odyssée intérieure. Entre rêves, contes et divagations, le monde réel plonge et refait surface remontant dans ses filets les mots évocateurs d'une fin lucidement traitée : mer Mouilleuse, pays Loindicie, vaisseau Mélopée... Les médecins, derrière le voile du sommeil ou de l'inconscience, parlent un langage de plus en plus mécanique, onomatopéique, borborygmique. Les voix tendres et non compatissantes de la mère et du voisin disent et masquent, et l'enfant, entre deux mondes, occupe fermement un langage à lui comme ultime territoire de protection. Du sens contre l'absurde. Le réel se déréalise, l'inconnu prend forme, sous l'esquisse d'une langue surréaliste. Le vieil homme, sous les traits de Melchior, aide l'enfant innocent à faire le deuil de la vie. Celle-ci ne se rendra que dans un festival d'assauts et de combats, de pillages et d'orgies. Peut-on quitter la vie autrement qu'en pirate et qu'en épicurien ? C'est un roman rare, dont l'écriture sert jusqu'au bout le projet d'évoquer notre insoutenable et précieuse condition. Tous humains, à la vie, à la mort.


Le soir tombait autour de nous, on entendait des bruits de chagrin un peu partout dans les couloirs. Maman a soupiré, en disant :
- Je crois que je vais essayer de te faire sortir d'ici, mon canard.
- Ben tu vois, j'aimerais autant, parce que de toute façon, ils ne me feront pas grand chose, ici.
Elle s'est embuée d'un seul coup.
- Pourquoi tu dis ça ?
- Tu sais bien qu'ils ne pourront pas me guérir.
Elle a pris ma main. Elle avait l'air grave jusqu'au milieu du coeur. J'aurais voulu lui raconter des jolistoires de citrouilles magiques et de fées qui seraient mes marraines et qui m'enlèveraient cette affreuseté qui me vampire l'intérieur. Mais j'avais pas envie de lui mentir.
Parfois, il faut dire la vérité, même quand elle n'est pas rigolote et qu'elle fait le coeur tout barbouillé. Alors j'ai murmuré :
- Ca m'embêtera de te laisser. Faudra pas que tu pleures...
Elle a silencé fort, à très grands battements de coeur. C'étaient rien que nos mains qui se parlaient, qui se disaient du tout-amour câlin, du
à la vie, à la ...

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